Oser changer de vie
« aujourd’hui est le premier jour du reste de ma vie. » victor hugo
L’autre jour, je discutais avec un ami avec qui je n’avais pas parlé depuis 20 ans ¹. (Merci Facebook !) Au delà du plaisir de le retrouver, c’était une conversation très enrichissante, car, forcément, on prend du recul sur une vie que l’on résume en quelques phrases… Il m’expliquait qu’il s’apprêtait à entamer sa 3ème vie. Une première vie plutôt insouciante et détachée en France, une deuxième vie très dure de père de famille responsable et travailleur aux Etats-Unis, et une nouvelle vie à venir de « retour au pays », dont il ne connaît encore ni le thème, ni les paramètres…
Cela m’a amené à réfléchir sur la question des changements de vie radicaux. Certains détestent le changement, et se sentent bien dans des repères stables, immuables, au sein d’une routine confortable et enveloppante. D’autres aiment tout balayer du jour au lendemain, suite à un déclic interne. Mais, parfois, c’est aussi la vie qui décide pour nous…
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Avoir plusieurs vies, plusieurs thèmes
Dans son livre « La spirale initiatique« , Maud Séjournant nous explique qu’elle a déjà vécu cinq vies : « N’est-ce pas un extraordinaire premier pas que de se réinventer soi-même et de se donner ainsi plusieurs vies ? Personnellement, je me suis donné cinq vies. Après ma vie parisienne relativement classique et bourgeoise, le cours du fleuve tranquille est allé retrouver l’océan, avec ma vie de gipsy des mers et d’insulaire à Saint-Barth, puis de mère de famille dans une case en bois buvant l’eau d’une citerne actionnée par l’électricité solaire ; ensuite, après un passage figuré et réel dans le désert, l’exploratrice de la conscience et la voyageuse des terres, depuis plus de vingt ans, vit au Nouveau-Mexique le rêve du Cercle de Vie avec une grande famille de coeur, et maintenant, je sais qu’une nouvelle aventure encore m’attend… Car la vie continue à se créer sans cesse dans les formes changeantes qu’elle nous offre. Il suffit de les saisir. »
Je me suis alors posé la même question, et je compte trois vies : une première vie assez calme, bourgeoise et superficielle, avec un parcours sans difficultés ni grands questionnements, une deuxième vie plutôt créative de chef d’entreprise, et une troisième vie en construction depuis déjà 4 ans s’orientant vers la recherche de l’équilibre et le développement personnel.
Il est intéressant de prendre du recul sur sa vie et d’observer les grandes étapes, en les nommant : cela donne le thème général de toute une période de vie (en général sur une dizaine d’années).
Changer radicalement de direction
Je m’aperçois que le thème du changement de vie m’a toujours fascinée. Dans mon entourage, j’ai beaucoup d’exemples très parlants :
- une directrice des ressources humaines devenue institutrice…
- une tradeuse devenue kinésithérapeute…
- une créatrice de bijoux devenue peintre…
- un commercial devenu dessinateur de BD…
- une éducatrice spécialisée devenue wedding planner…
- un maître d’hôtel devenu masseur et professeur de méditation…
- un designer graphique devenu énergéticien…
- une chef de produits devenue monitrice de plongée aux Bahamas…
Bien sûr, le but n’est pas de changer à tout prix, changer « pour changer ». Surtout si l’on est heureux comme cela, dans notre vie actuelle. Mais, dans le cas contraire, c’est possible, si l’élan vient du plus profond de nous… Les obstacles et les peurs ¹ se lèveront automatiquement, les portes s’ouvriront naturellement.
Voir aussi ¹ Traverser ses peurs Le bon moment, c’est maintenant Deux méthodes différentes pour avancer dans la vie
Suivre son élan, saisir une opportunité, sentir un déclic
On peut en fait changer de vie à tout moment¹ : après tout, « aujourd’hui est le premier jour du reste de ta vie… »
Parfois, c’est un élan ² qui vient de notre âme, sans que l’on sache pourquoi… Une envie qui revient en boucle, comme un thème ³ dans notre vie… Comme un appel.Et puis, un jour, on s’en empare. On y répond. Le projet a mûri dans notre inconscient, et, soudain, on est prêt.
Parfois, c’est plus inattendu, une opportunité à saisir, un déclic soudain, qui change notre vie du jour au lendemain, sans préavis : un mentor, un événement, une phrase ⁴, une rencontre, la vie qui nous arrête ⁵, une goutte d’eau qui fait déborder le vase… On est parfois le premier surpris !
« Un matin comme tous les autres
Un nouveau pari
Rechercher un peu de magie
Dans cette inertie morose
Clopin clopan sous la pluie
Jouer le rôle de sa vie
Puis un soir le rideau tombe
C’est pareil pour tout l’monde
Rester debout mais à quel prix
Sacrifier son instinct et ses envies
Les plus essentielles
Mais tout peut changer aujourd’hui
Et le premier jour du reste de ta vie
Plus confidentiel
Pourquoi vouloir toujours plus beau
Plus loin plus haut
Et vouloir décrocher la lune
Quand on a les étoiles
Quand les certitudes s’effondrent
En quelques secondes
Sache que du berceau à la tombe
C’est dur pour tout l’monde
Rester debout mais à quel prix
Sacrifier son instinct et ses envies
Les plus confidentielles
Mais tout peut changer aujourd’hui
Et le premier jour du reste de ta vie
C’est providentiel
Debout peu importe le prix
Suivre son instinct et ses envies
Les plus essentielles
Tu peux exploser aujourd’hui
Et le premier jour du reste de ta vie
Non accidentel
Oui tout peut changer aujourd’hui
Et le premier jour du reste de ta vie
Plus confidentiel »
Etienne Daho, le premier jour du reste de ta vie
Ainsi, entre ma première et ma deuxième vie, il s’est passé… quelques jours… J’ai eu mon déclic, et démissionné 3 jours après. Dans le même ordre d’idée, la vie de l’héroïne du film Samba change quand elle lance son portable dans la tête de son collègue dans un élan de fureur incontrôlable…
Sur le thème du changement de vie, je vous invite à voir le magnifique et poignant film documentaire Waste Land de Lucy Walker (nominé aux Oscars), qui relate les trois ans de travail de l’artiste Vik Muniz avec les travailleurs d’une décharge, et comment cette participation leur ouvre les yeux et les portes d’un avenir différent …
Je vous recommande également la lecture du livre « Le moine qui vendit sa Ferrari » de Robin S. Sharma.
Voir aussi ¹Se surprendre soi-même Laisser partir ce qui doit partir…. ² Suivre son élan… ³ Etre attentif aux synchronicités dans sa vie ⁴ Quand un inconnu nous donne des clefs ⁵ Savoir s’arrêter à temps
La fameuse « crise du milieu de vie »
Les changements et remises en question interviennent souvent également lors d’une prise de conscience, à un moment où l’on se penche sur sa vie et on regarde en arrière. Il n’est pas anodin que beaucoup de changements se produisent autour de la quarantaine…
C’est la fameuse « crise du milieu de la vie », on prend conscience que le temps a passé et on regarde en arrière, se demandant soudain ce que l’on a réalisé, ce qu’il reste à faire, où sont partis nos rêves, ce que l’on a envie d’accomplir pour la deuxième moitié à venir.
Et peut-être même non plus ce que l’on a envie de faire, mais ce que l’on a envie d’être…
Etes-vous satisfait de votre vie ?
C’est l’occasion de se poser les grandes, les bonnes questions… Un classique de l’introspection, c’est le fameux : « Que feriez-vous si vous gagniez au loto ? » C’est un bon moyen de savoir si on est heureux…
Parfois, notre vie nous convient parfaitement, et on n’a aucune envie de la changer radicalement. C’est d’ailleurs le point de départ du livre La liste de mes envies de Grégoire Delacourt. L’héroïne gagne au loto et se rend compte qu’elle n’a tout simplement pas envie de changer de vie…. et elle n’encaisse pas le chèque.
Mais, dans le cas contraire, il faut bien se rendre compte qu’on n’est pas « condamné » à s’étioler dans une routine qui ne nous convient pas, ou ne nous convient plus. Attention à ne pas vous laisser enfermer et bouillir¹ à petit feu… Gardez, ou retrouvez votre vigilance, avant que vous soyez cuit…
Voir aussi ¹ L’allégorie de la grenouille cuite à petit feu
Une période de transition
Et puis, souvent, entre deux vies, se dessine une zone de transition un peu flottante, un peu floue, une sorte de « sas de décompression » pour passer de l’une à l’autre et faire les ajustements matériels, émotionnels et psychologiques nécessaires.
C’est souvent le moment où l’on se sent « dans le brouillard« , on n’a aucune visibilité¹ sur l’avenir. C’est une période assez inconfortable en général : on perd ses repères, et, littéralement, on ne sait pas où l’on met les pieds… Mais il me semble que c’est un moment inévitable qui participe au processus général.
Ainsi, si vous vous sentez perdu dans le brouillard, gardez confiance ! C’est que l’avenir est en train de se dessiner…
Voir aussi ¹ Bien (se) conduire sur le chemin de Vie
Qui vous accompagne sur votre nouveau chemin ?
Un vrai changement de vie, un nouveau départ, c’est souvent un grand chamboulement, qui a des répercutions sur notre mode de vie, notre travail, nos loisirs, mais aussi sur notre façon de voir les choses ¹…
Il est probable que cela aura aussi des répercutions sur votre entourage. Certains proches, les « vrais » ², seront toujours là pour vous, quelles que soient les circonstances. Mais il y aura peut-être des ajustements au départ, le temps qu’ils s’habituent et qu’ils vous comprennent. Pour les autres, ceux qui choisiront de ne pas vous accompagner sur votre nouveau chemin, ce sera l’occasion de les quitter en douceur (ou pas !).
Et puis, il y aura les nouvelles personnes ³ qui arriveront comme par magie le long de votre nouvelle voie, peut-être parce qu’elles sont elles aussi à un carrefour ⁴ et qu’elles vous croiseront à cette occasion, ou peut-être parce que leur propre cheminement les emmènera sur une voie parallèle au vôtre…
Voir aussi ¹ Plusieurs étapes de l’évolution de la Conscience ² S’abandonner à l’émotion ³ S’enrichir au contact des autres ⁴ Prendre le temps de prendre la bonne décision
Oser se lancer …
Pour conclure et vous donner du souffle si vous cherchez l’inspiration, voici un extrait motivant du très stimulant livre de Tim Ferriss » La semaine de quatre heures » :
» Il retint sa respiration sur le dernier pas et la panique lui fit presque perdre conscience. Sa vision se brouilla, se rétrécissant sur une seule épingle de lumière et puis… il flotta. L’immensité bleue frappa son champ de vision un instant après qu’il avait pris conscience que le courant thermique ascendant les emportait, lui et les ailes de son parapente. La peur était derrière lui, au sommet de la montagne. Plusieurs milliers de pieds au-dessus de la forêt tropicale resplendissante et des plages immaculées de Copacabana, Hans Keeling avait vu la lumière.
C’était un dimanche.
Le lundi, Hans retrouva son cabinet d’avocats de Century City, le havre chic d’entreprises de Los Angeles, et remit sans tarder son préavis de trois semaines. Pendant près de cinq ans, il avait regardé son réveil tous les matins avec la même angoisse : il va falloir que je continue ça pendant quarante ou quarante-cinq ans ? Une fois, il avait dormi par terre sous son bureau après un projet exténuant à demi achevé, pour reprendre le collier de plus belle le lendemain matin. Ce matin-là, il s’était fait une promesse : encore deux coups du même acabit et je mets les voiles. Le coup numéro 3 avait frappé la veille de son départ en vacances au Brésil.
Nous nous faisons tous ce genre de promesses et Hans, lui non plus, n’y avait pas manqué, mais cette fois, les choses n’étaient plus tout à fait comme avant. Il était différent. Il avait pris conscience de quelque chose en descendant en cercles lents vers la terre : que les risques sont beaucoup moins effrayants une fois que vous les avez pris. Ses collègues lui tinrent un langage sans surprise, lui disant qu’il fichait tout en l’air. Il était avocat, en route vers les sommets : que voulait-il donc de plus ?
Hans ne savait pas très bien ce qu’il voulait mais il y avait goûté. En revanche, il savait parfaitement ce qui l’ennuyait à pleurer et il ne voulait plus en entendre parler. C’en était fini de vivre parmi les morts vivants, fini les dîners au cours desquels ses collègues comparaient leurs voitures, n’en finissant pas de gloser sur l’achat d’une nouvelle BMW jusqu’à ce que quelqu’un achète une Mercedes plus chère. Terminé.
Immédiatement, un étrange changement s’enclencha : pour la première fois depuis très longtemps, Hans se sentait en paix avec lui-même et ce qu’il faisait. Il avait toujours été terrifié par les turbulences en avion, mais à présent, il pouvait traverser une violente tempête endormi comme un bébé. Etrange, vraiment.
Plus d’un an plus tard, il recevait toujours des propositions d’embauche de cabinets d’avocats mais à ce moment-là, il avait lancé Nexus Surf, une société de séjours de surf de luxe dans le paradis tropical de Floriaonopolis, au Brésil. Il avait rencontré la femme de ses rêves, Tatiana, une Carioca à la peau caramel, et passait l’essentiel de son temps à se détendre sous les cocotiers ou à offrir à ses clients les meilleurs moments de leur vie.
Etait-ce là ce qu’il avait tant redouté ?
Désormais, il retrouve souvent son ancien moi dans les avocats et autres médecins malheureux et surmenés qu’il emmène en mer. En attendant la vague, ils laissent libre cours à leurs vraies émotions : « Bon sang, comme j’aimerais faire ce que vous faites. » Il leur fait toujours la même réponse : « Vous pouvez. »
Le soleil déclinant se reflète sur la surface de l’eau, cadre paisible à un message dont il sait qu’il est vrai : ce n’est pas renoncer que de mettre votre chemin actuel en mode pause infini. S’il le voulait, il pourrait reprendre sa carrière d’avocat exactement là où il l’a laissée, mais cela ne lui effleure même pas l’esprit.
Comme ils pagaient vers le rivage après une séance inoubliable, ses clients reprennent leurs esprits et se ressaisissent. Ils posent le pied sur le rivage et les griffes de la réalité reprennent leurs droits : « J’aimerais bien mais je ne peux vraiment pas tout gâcher. »
Hans ne peut s’empêcher de rire. »